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Saturday, July 13, 2013

L'affice Rouge

L'Affiche rouge is a song from the album Les Chansons d'Aragon (1961) by Léo Ferré. Its lyrics are based on the poem Strophes pour se souvenir (Strophes to help you remember) which Louis Aragon wrote in 1955 for the inauguration of a street in the 20th arrondissement in Paris, named "rue du Groupe Manouchian" in honor of 23 members of the FTP-MOI executed by the Nazis in the Mont-Valérien. The affair became known by the name of the Affiche rouge ("Red Poster") because the Germans plastered Paris in the spring of 1944 with thousands of red posters denouncing the Resistants. The poem paraphrases Missak Manouchian's last letter to his wife.

L'Affiche rouge
Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l'orgue, ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà, que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des partisans.

Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit, hirsutes, menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants.

Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos " Morts pour la France"
Et les mornes matins en étaient différents.

Tout avait la couleur uniforme du givre
À la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement:
"Bonheur à tous, bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand."

"Adieu la peine et le plaisir. Adieu les roses
Adieu la vie. Adieu la lumière et le vent
Marie-toi, sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erevan."

"Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée, ô mon amour, mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant."

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient le coeur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient "la France!" en s'abattant.
The Red Poster
You demanded neither glory nor tears
Nor organ music, nor last rites
Eleven years already, how quickly eleven years go by
You made use simply of your weapons
Death does not dazzle the eyes of partisans.

You had your pictures on the walls of our cities
Black with beard and night, hirsute, threatening
The poster, that seemed like a bloodstain,
Using your names that are hard to pronounce,
Sought to sow fear in the passers-by.

No one seemed to see you French by choice
People went by all day without seeing you,
But at curfew wandering fingers
Wrote under your photos "Fallen for France"
And it made the dismal mornings different.

Everything had the unvarying colour of frost
In late February for your last moments
And that's when one of you said calmly:
"Happiness to all, happiness to those who survive,
I die with no hate in me for the German people.

"Goodbye to pain, goodbye to pleasure. Farewell the roses,
Farewell life, the light and the wind.
Marry, be happy and think of me often
You who will remain in the beauty of things
When it will be all over one day in Erevan.

"A broad winter sun lights up the hill
How nature is beautiful and how my heart breaks
Justice will come on our triumphant footsteps,
My Mélinée, o my love, my orphan girl,
And I tell you to live and to have a child."

There were twenty-three of them when the guns flowered
Twenty-three who gave their hearts before it was time,
Twenty-three foreigners and yet our brothers
Twenty-three in love with life to the point of losing it
Twenty-three who cried "France!" as they fell.

Sunday, August 29, 2010

Missak MANOUCHIAN: La lutte

La lutte
Les rêves, les amours, dans l’effort et la lutte,
A la clarté de ma raison, deviennent haine,
Comme le vin des bouteilles longtemps bouchées
Prend à l’air un goût d’amertume.
Quand mes longues pensées sans cesse sont battues
Sur l’enclume de la misère quotidienne,
La vengeance, la colère en moi prennent feu,
Un feu qui crépite d’impatience.
Et me pénètre alors l’immense joie soudaine,
Dans les baisers d’amour, je retrouve ce feu,
La flamme vive de la vengeance et de la haine
Qu’il faut transmettre à ceux qui souffrent.
Un feu pour tuer en eux le dieu obscur,
Un feu pour la patience et l’espoir sombre,
Un feu pour y tremper la lame des épées,
Le feu de la vie amère et de la liberté.

M.Manouchian 1934
adaptation de Jacques Gaucheron
Revue "EUROPE" Littérature arménienne" fév.mars 1961 PARIS.

Monday, March 16, 2009

Missak Manouchian: En route vers la France

En route vers la France
La nuit vient de couvrir tout entière en silence
La Méditerranée, ivre encore de soleil.

Le ciel devient la voute immense et étoilée.
L’horizon n’est jamais si bas que sur la mer.

La brise douce étend, inlassable, le baume
De la mer sur mes cheveuc sur mon visage...

Le navire tout illuminée, déchire la nuit
De ses flancs d’acier, tranche le pli des flots.

Le navire s’en va.

L’écume du sillage ainsi que mes pensées,
S’enfuit derrière dans une course folle.

Mon âme est déjà loin devant.

J’ai laissé là-bas mon enfance repue d’esclavage,
Ma solitude d’orphelin tissée de misère.

Adolescent rêveur de livres, de cahiers,
Je vais mûrir, au feu de la vie, de la pensée.

Mon désir est aussi vaste que la mer,
Incompréhensible comme une sagesse obscure.

Je veux goûter à la clarté savante, au vin de l’art,
Remporter sur l’arène de la vie des lauriers de gloire.

Missak Manoouchian 1924

Wednesday, July 23, 2008

Missak Manouchian: Les couturières

Dédié aux couturières de Paris

Elles sont là, devant la machine à coudre
Au premier rayon du soleil
Et coudront jusqu’à la nuit sans relâche,
S’abreuvant de jour jusqu’à tomber de sommeil.
La commande presse,le travail exige du soin,
Il le faut, sinon, c’est le chômage demain
Qui met à la merci de la misère
Dont le spectre est toujours là, montrant ses crocs.
Ainsi besognent-elles pour un patron
Qui les exploite sans pitié.
Révoltée ou soumise, la couturière
Chaque jour pose en tremblant son coeur sur son pain.
Elles sont les prisonnières malheureuses
De la fortune des grandes villes luxueuses
Et leur vie goutte à goutte s’écoule
Dans la coupe de la richesse et des orgies.
Voici les vieilles sans secours dont les mains sèchent,
Les veuves lasses qui ont tout perdu dans la vie,
Les jeunes filles adorables aux rêves sans mesure,
Qui sans se plaindre, engloutissent leur vie dans la misère.
Le travail sacré s’est changé en monstre.
On s’épuise à vouloir lui échapper
Mais sa griffe est puissante, elle asservit
Lentemant les âmes les plus nobles.
Lorque je vois cette lumière dans vos yeux
Qui s’éteint peu à peu pour un morceau de pain,
O mes soeurs, j’ai le coeur qui saigne, je voudrais
De votre épaule ôter le fardeau de la vie.
Et je serre les dents, et je serre les poings,
Haine et vengeance au fond du coeur...
Versez en moi votre souffrance, pour ranimer la flamme
Sacrée, de la lutte contre l’exploitation.

Missak Manouchian 1924

Revue "EUROPE" Littérature arménienne" fév.mars 1961, PARIS